Translate

vendredi 14 janvier 2011

L’ÂNE DE SCHUBERT/LES BUTS ET OBJECTIFS

Bien souvent, nous nous fixons des buts qui nous rendront heureux, croyons-nous, des buts que nous visons, que nous poursuivons ardemment, persuadés que le bonheur passe forcément par là. Mais ce sont ces objectifs qui font notre malheur, qui nous condamnent, qu’ils soient atteints ou non. Ils nous obligent à emprunter une route bien particulière, sur laquelle on ne peut pas revenir sur ses pas, où les détours n’ont pas leur place. Le bonheur est censé se trouver au bout de cette seule route. 
Dorénavant, nous n’avons guère de place pour manœuvrer et beaucoup d’intervalles à remplir. Et, une fois arrivés, que nous reste-t-il à faire? Donc, à présent, j’ai renoncé à concrétiser mes rêves. Je veille à les cantonner uniquement au domaine du sommeil, un domaine des plus modestes. Je me console en écoutant ce que nous a dit Jacques Brel dans Avec élégance : « Ils n’ont plus grand-chose à rêver/Mais ils écoutent leur cœur qui danse/ Ils sont désespérés/Mais avec élégance. » 
Désormais, en écoutant mon cœur qui danse, je m’abandonne plutôt à des songeries, dans un lieu où je n’ai jamais rêvé d’être, où je suis venu échouer par hasard, plutôt que de ma propre volonté. Et ce lieu, je ne lui demande rien, je n’en attends rien, je n’ai aucune exigence. Et lui, en retour, n’en a pas non plus. Nous nous entendons bien d’une certaine manière, une manière instinctive, comme je m’entends bien avec Gribouille. C’est là que réside notre accord tacite, l’histoire secrète de notre succès, notre élégance.
MERRIFIELD, A. (2008). L’âne de Schubert. Paris, Actes Sud, p. 226-227/408

Aucun commentaire:

Publier un commentaire